Le cannabis comme antidouleur : plus de mal que de bien ?
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A quand le cannabis sur ordonnance ?

Quoi qu’il en soit, cette analgésie modeste des cannabinoïdes synthétiques (comme le Nabiximols) leur a ouvert des indications dans de nombreux pays. Le Canada, 24 états des USA, Israël etc. ont déjà autorisé les cannabinoïdes dans les douleurs liées aux nerfs (neuropathiques centrales) et les douleurs rebelles du cancer. En Europe, le nombre de pays qui franchissent le pas progresse (Espagne, Italie, Suisse, Allemagne, Irlande, Roumanie). Même en France, le Nabiximols avait obtenu en 2014 le feu vert des autorités sanitaires dans la sclérose en plaques. Mais depuis, cette décision est restée lettre morte faute d’un accord sur le prix et d’une réelle volonté sanitaires. Pour le moment dans l’Hexagone, seul le dronabinol (THC de synthèse) dispose d’une « ATU nominative » (une autorisation temporaire d’utilisation qui concerne un seul malade nommément désigné), dans la sclérose en plaques. 70 patients ont pu en profiter en 2015.

Par ailleurs, l’usage "compassionnel" (culture et usage personnels tolérés) du cannabis fumé dans le glaucome (maladie de l’œil), le cancer ou la sclérose en plaques est d’usage aux Etats-Unis.

Pr Didier Bouhassira (Inserm U987, Centre d’évaluation et de traitement de la Douleur, hôpital Ambroise Paré, Boulogne-Billancourt) : « Le soulagement procuré par les cannabis synthétiques et plus généralement le Nabiximols est modeste. Mais pourquoi pas ? En effet, le besoin est là, car l’efficacité très limitée de certains médicaments dans les douleurs cancéreuses laisse de nombreux patients et soignants démunis ».

Cannabis "antidouleur" : associé à de vrais dangers pour la santé

Reste que le cannabis et ses dérivés ne sont pas dénués d’effets secondaires.

Outre les hallucinations, vomissements, diarrhées, asthénie (affaiblissement de l’organisme) ou confusion, les plus problématiques sont ceux provoqués par l’usage du cannabis à long terme comme les troubles cognitifs, c’est-à-dire la détérioration des processus mentaux de la mémoire, du jugement, de la compréhension, et du raisonnement. Le cannabis est aussi un facteur favorisant de troubles psychiatriques (dépression, anxiété et psychoses).

Par ailleurs, le risque de cancer est majoré : les substances carcinogènes sont jusqu’à trois fois plus toxiques que celles du tabac. Par exemple, l’augmentation du risque du cancer du poumon s’accroît de 8% par joint/jour sur une durée d’un an.

Quant à l’effet addictogène, il est moins puissant que celui de l’alcool ou des opiacées (morphine). « Seuls » 10% des fumeurs réguliers deviennent addicts. Mais c’est sans compter les nouveaux cannabis synthétiques, qui peuvent être de 20 à 500 fois plus concentrés en THC !

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Source : D’après les interventions des Prs Serge Perrot, rhumatologue au Centre d’évaluation et de traitement de la Douleur (Hôpital Cochin, Paris) et Didier Bouhassira (Inserm U987, Centre d’évaluation et de traitement de la Douleur, hôpital Ambroise Paré, Boulogne-Billancourt) au congrès de la Société française d’étude et de traitement de la douleur (SFETD ; Bordeaux, 24-26 novembre 2016).